Condamné à perpétuité, il est remis en semi-liberté.

Claude Dunand. Pourvoyeur de chair fraîche pour l'Etat pédocriminel français.

 

Frédéric Vézard | 16.06.2001

LA CHAMBRE des libérations conditionnelles de Colmar a rendu son verdict dans la plus grande discrétion, le 5 avril dernier. « La nature des faits qui ont valu la condamnation du détenu n'est pas le critère principal d'une telle décision », explique, gêné, l'un des trois magistrats qui composent cette instance.

C'est ainsi que Claude Dunand, 66 ans, a quitté, le 1 e r juin dernier, sa cellule de la prison d'Enzisheim, près de Mulhouse. Il bénéficie pour l'instant d'un régime de semi-liberté, sa libération conditionnelle n'interviendra effectivement que le 1 e r janvier prochain. Cette libération anticipée cause un émoi considérable dans l'Yonne. Dunand, ancien VRP dans une société de produits surgelés, a été condamné en 1991 à la réclusion à perpétuité par la cour d'assises de Versailles pour « séquestration et viols accompagnés de tortures et d'actes de barbarie ». Il n'aura effectué que seize ans de prison. Arrêté le 23 janvier 1984 dans son pavillon d'Appoigny, près d'Auxerre, il est au coeur d'une affaire sordide. Fin 1983, Claude Dunand et son épouse Monique avaient recruté, via une petite annonce demandant « une jeune fille pour s'occuper d'une personnes âgée », Huguette M., 19 ans, et Mickaëlla G., 22 ans. Ce sont deux orphelines placées sous la responsabilité de la Ddass. Mickaëlla, handicapée mentale légère, a fréquenté pendant deux ans l'institut médico-éducatif de Grattery, où étaient scolarisées quatre des disparues de l'Yonne. Des victimes traumatisées Chez les Dunand, Huguette et Mickaëlla plongent en enfer. Enfermées à tour de rôle dans la cave du pavillon, elles sont soumises aux fantasmes de mystérieux clients. Une trentaine de personnes au moins firent subir des sévices aux victimes. Des affiches retrouvées par les enquêteurs de la police judiciaire de Versailles fixaient les « tarifs » payés par les participants : « 200 F pour cravacher ou fouetter, 300 F pour la pose de pince ou d'aiguilles, 600 F pour brûler. » La libération anticipée de Claude Dunant choque parce qu'elle s'inscrit dans la continuité d'un dossier qui n'a pas livré tous ses mystères. L' enquête a établi que le couple Dunand avait commencé ses activités sadiques dès 1981, mais une seule autre victime a pu être retrouvée. Et seulement cinq des trente clients supposés ont été poursuivis. Lors de l'instruction, Claude Dunand a évoqué à de nombreuses reprises une mystérieuse « organisation » avant de se rétracter au procès. Dans le pavillon, les enquêteurs ont saisi plusieurs « carnets d'adresses dont l'exploitation, note l'arrêt de renvoi, ne permettait pas de retrouver d'autres tortionnaires ». Lors du procès, le président de la cour d'assises a regretté « la disparition d'un carnet noir qui aurait pu amener de précieuses informations ». En apprenant la libération de leur bourreau, Huguette et Mickaëlla ont décidé de confier leurs intérêts à Didier Seban, également avocat des familles des victimes d'Emile Louis. « Elles sont inquiètes et traumatisées, explique le juriste. Elles souhaitent que le juge d'application des peines prenne toutes les mesures possibles afin d'empêcher Dunand d'entrer en contact avec elles. »

Le Parisien

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